La latence réseau est l’un des problèmes les plus frustrants pour les utilisateurs et les administrateurs. Que ce soit pour une visioconférence, une application cloud ou un transfert de données, des retards inexpliqués peuvent nuire à la productivité. Heureusement, des outils comme Wireshark et TCPdump permettent d’analyser en profondeur les causes de ces ralentissements. 

Dans cet article, nous allons explorer comment diagnostiquer efficacement les problèmes de latence en examinant les indicateurs clés du protocole TCP/IP, tels que les retransmissions, les temps d’aller-retour (RTT) et les fenêtres de congestion

1. Comprendre les Causes de la Latence Réseau 

Plusieurs facteurs peuvent provoquer une latence excessive : 

  • Congestion du réseau : Une bande passante saturée ralentit les flux de données. 
  • Pertes de paquets : Si des paquets TCP sont perdus, leur retransmission augmente les délais. 
  • Problèmes de routage : Un chemin réseau sous-optimal ou asymétrique peut introduire des retards. 
  • Latence applicative : Des serveurs surchargés ou des requêtes mal optimisées peuvent aussi être en cause. 
  • Défaillances matérielles : Des cartes réseau défectueuses ou des câbles endommagés peuvent dégrader les performances. 

Identifier la source exacte du problème nécessite une analyse fine du trafic réseau. 

2. Capturer et Analyser le Trafic avec Wireshark et TCPdump 

A. Capture des Données Réseau 

TCPdump est un outil en ligne de commande qui permet d’enregistrer le trafic réseau dans un fichier pour une analyse ultérieure. Il offre des options de filtrage pour cibler des protocoles ou des ports spécifiques. 

Wireshark, avec son interface graphique, permet une analyse plus intuitive. Une fois la capture chargée, on peut appliquer des filtres pour isoler les flux problématiques, comme les paquets retransmis ou les accusés de réception (ACK) retardés. 

B. Filtres Utiles pour Diagnostiquer la Latence 

Dans Wireshark, certains filtres aident à identifier rapidement les anomalies : 

  • Retransmissions TCP : Indiquent des paquets perdus ou des ACK manquants. 
  • Temps d’aller-retour (RTT) : Mesure le délai entre l’envoi d’un paquet et la réception de son accusé. 
  • Fenêtres TCP trop petites : Signe possible de congestion réseau. 

Ces métriques permettent de déterminer si le problème vient du réseau, du serveur ou de l’application. 

3. Analyser les Indicateurs Clés du TCP/IP 

A. Round-Trip Time (RTT) – Le Temps de Réponse 

Le RTT mesure le temps nécessaire pour qu’un paquet atteigne sa destination et que son accusé de réception revienne. Un RTT élevé (supérieur à 200 ms dans un réseau local) peut indiquer : 

  • Un routage inefficace 
  • Une congestion sur le réseau 
  • Une surcharge du serveur 

Dans Wireshark, des graphiques dédiés permettent de visualiser les variations du RTT et d’identifier des pics anormaux. 

B. Les Retransmissions TCP – Signe de Pertes de Paquets 

Lorsqu’un paquet est perdu, TCP le retransmet après un délai d’attente. Trop de retransmissions (plus de 1 % du trafic) révèlent : 

  • Une instabilité du réseau 
  • Une congestion entraînant des pertes de paquets 
  • Des erreurs matérielles (switch, câble défaillant) 

En filtrant ces retransmissions, on peut localiser où et pourquoi elles se produisent. 

C. Fenêtres TCP et Congestion 

La fenêtre TCP détermine combien de données peuvent être envoyées avant d’attendre un accusé. Si elle est trop petite, le débit chute. Deux problèmes courants : 

  • Fenêtre TCP nulle (Zero Window) : Le récepteur est saturé et ne peut plus recevoir de données. 
  • Réduction brutale de la fenêtre : Souvent due à de la congestion réseau. 

Ces symptômes peuvent être corrigés en ajustant les paramètres TCP ou en optimisant la qualité de service (QoS). 

4. Problèmes Avancés et Solutions 

A. Délais d’Accusés de Réception (ACK Delay) 

Si un serveur met trop de temps à envoyer un ACK, cela ralentit toute la communication. Causes possibles : 

  • Charge CPU excessive sur le serveur 
  • Paramétrage inefficace de la carte réseau 
  • Latence introduite par un pare-feu ou un proxy 

B. Paquets en Désordre (Out-of-Order) 

Quand les paquets arrivent dans le mauvais ordre, TCP doit les réorganiser, ce qui augmente la latence. Cela peut venir : 

  • D’un routage asymétrique (les paquets prennent des chemins différents) 
  • De problèmes de buffering sur un équipement réseau 

C. Fragmentation et Problèmes de MTU 

Si la taille maximale des paquets (MTU) est mal configurée, certains routeurs les fragmentent, ce qui ajoute de la latence. La solution consiste à : 

  • Ajuster le MTU pour éviter la fragmentation 
  • Activer le Path MTU Discovery pour une détection automatique 

5. Outils Complémentaires pour le Diagnostic 

En plus de Wireshark et TCPdump, d’autres outils aident à investiguer la latence : 

  • Ping et Traceroute : Pour mesurer les délais entre les machines et identifier les sauts problématiques. 
  • MTR : Combine Ping et Traceroute pour une analyse en temps réel. 
  • Iperf3 : Teste la bande passante et la latence entre deux points. 

Conclusion 

Diagnostiquer les problèmes de latence nécessite une approche méthodique : 

  1. Capturer le trafic au bon endroit (côté client, serveur ou routeur). 
  1. Analyser les indicateurs TCP (RTT, retransmissions, fenêtres). 
  1. Corréler les données pour identifier la source du ralentissement. 

Grâce à Wireshark et TCPdump, les administrateurs réseau peuvent résoudre efficacement les problèmes de performance, améliorant ainsi l’expérience utilisateur et la productivité.